COCTEAU (Jean).

" Les Vacances andromaque" [écrit au nom de Jean Marais]. Manuscrit autographe signé du nom du comédien [circa 1944] ; 7 pages 1 / 2 in-4 ; fente à deux pages. " Cette année j'ai décidé de prendre des vacances, c'est-à-dire de refuser plusieurs films et de monter une pièce avec amour. Faire le décor, les costumes, grouper des artistes que j'aime, inventer leur mise en scène et jouer le rôle d'oreste, voilà des vacances qui me plaisent, faute de pouvoir nager au soleil. J'ai choisi Andromaque parce que j'y rêvais depuis Britannicusoù le rôle de néron m'avait valu beaucoup de chance. Le théâtre edouard Vii devint notre lieu de rencontre, sorte de plage sombre, car les restrictions d'électricité nous obligeaient à répéter à la lueur très vague d'une lampe à acétylène. J'admirais le courage d'annie Decaux, de Michèle alfa, de Cuny qui me suivaient dans mon entreprise et n'avaient peut-être pas les mêmes raisons que moi de prendre ces étranges et fatiguantes vacances... notre but était de faire vivre devant eux, de les obliger à y venir à cause de nos films et de les convaincre de leurs erreurs. Le public se ruait au guichet de location, et, avant de commencer les salles étaient pleines. La répétition générale et la première, où, par suite des circonstances qui rendaient le travail presque impossible, (l'ensemble boîtait encore et ne formait pas son bloc) fût un mélange de triomphe et de mauvaise humeur. Les uns sentaient notre travail et subissaient le prestige visuel de la scène, les autres étaient décidés d'avance à ne pas admettre notre méthode. Les injures, les colères, les moqueries de ces salles effrayantes qui s'assemblent pour démolir ce qui est neuf et cherche à sortir de vieux cadres, céda brusquement la place au vrai public (le samedi, le dimanche en matinée et le dimanche soir) où nous eûmes la joie de récolter la récompense de notre effort, d'une manière si belle, si complète, si émouvante que nous n'aurions jamais oser le prévoir... Le Dimanche soir nous e